9/02 session II 17H15 - 18H30
Responsable : Ronan Keryell – Enseignant-chercheur à l’ENSTB
Intervenant(s) : Olivier ARCHER – IFREMER Brest
Philippe CAILLAUD – IFSIC Rennes
David DECOTIGNY – IRISA Rennes
Henri JACOB – Rectorat de Rennes
Henri PRIGENT – France Télécom
Sébastien Bechet – Etudiant IFSIC Rennes
David MENTRE – INRIA Rennes
Cyril CARREZ – ENST Paris
Yann DIETRICH – Groupe des Ecoles des Télécommunications
Rapporteurs : Hossein Borojeni et Jordi Osso
Animateur : Ronan Keryell, ENST Bretagne – département informatique
Mél : ronan.keryell@enst-bretagne.fr
Organisation de l’atelier :
Après une brève présentation de chacun des participants l’animateur de l’atelier, Monsieur Keryell, a ouvert le débat en posant les questions suivantes:
Suite a ces questions les intervenants ont discuté des problèmes que rencontre aujourd’hui le développement du libre. Ils ont, par ailleurs, proposé des idées pour les éventuelles interventions de l’Etat dans le domaine.
Synthèse de l’atelier :
Contexte :
M. Keryell a introduit le débat en parlant des tendances actuelles du monde logiciel : en effet, aujourd’hui les problèmes liés au logiciel libre deviennent très à la mode. Son utilisation se démocratise de plus en plus et de nouvelles entreprises de service spécialisées profitent de ce nouveau marché. Mais d’un autre coté, cette course à la commercialisation joue en défaveur des développeurs volontaires qui pourraient y perdre leurs incitations. Dans un tel contexte, l’Etat devrait-il à son tour s’intéresser à ce domaine ? Comment pourrait-il intervenir et dans quel sens ?
Encourager le développement du libre :
Un des problèmes qui se pose aujourd’hui dans le domaine du logiciel libre est celui de son développement En effet, la question est de savoir qui va continuer à développer le logiciel libre ? Et surtout qui va s’occuper du développement des parties " non sexy " des logiciels c’est à dire les parties non amusantes pour les développeurs tels que les adaptations aux besoins, les corrections de bugs… L’Etat, devrait-il jouer un rôle dans l’encouragement du développement du logiciel libre ? Devrait-il, en particulier, financer le développement de ces parties " non amusantes " ?
Selon un des intervenants, une idée intéressante pour l’Etat français serait d’essayer de diriger les projets étudiants vers la résolution des problèmes du logiciel libre, ce qui valoriserait par ailleurs aussi bien le travail de l’étudiant que celui de l’enseignant car il aura contribué à l’amélioration d’un logiciel utile et utilisable pour tout le monde.
Mais cela pose le problème du droit de la propriété intellectuelle : est-ce que le travail de l’étudiant appartient à l’Etat? Peut-on donc obliger un étudiant à déposer son travail sous la licence GPL ? La question est valable tout autant pour ce qui est du travail des fonctionnaires : l’Etat peut-il imposer aux fonctionnaires de faire du logiciel libre ? Qui est propriétaire du logiciel crée par les fonctionnaires ? Et si l’Etat en est propriétaire, que doit-il en faire ?
En tout cas, aux États-Unis ces logiciels sont libres car étant donné qu’ils sont financés par des fonds publics ils doivent rester dans le domaine public. Mais ils ne sont pas déposés sous la licence GPL qui impose beaucoup de contraintes, ils sont déposés sous la licence Barkley qui n’empêche pas les entreprises à se les approprier en les modifiant et en fermant ensuite le code source (car l’Etat américain n’est pas censé intervenir dans le commerce).
Utiliser des formats libres :
Mais plutôt que d’obliger les fonctionnaires à déposer sous GPL, l’Etat pourrait peut-être simplement imposer l’utilisation des formats libres dans les services publics, a remarqué un des étudiants participant au débat. Ce qui aura un effet de normalisation nationale car l’Etat étant un grand acteur dans le pays, les industrielles le suivront et adopteront ses formats. Par ailleurs l’utilisation des formats libres, donc compatibles, est plutôt favorable à la concurrence et aux nouveaux entrants dans le marché.
De plus les formats et les algorithmes libres sont plus fiable. Et comme la priorité pour l’Etat est d’abord la sécurité des citoyens, il devrait donc plus insister sur la standardisation des formats de fichiers (L’exemple de la carte Sésame a été évoqué : beaucoup d’argent public versé dans les caisses de Cegetel et beaucoup de freins à l’avancement du projet et encore plus à l’utilisation de la carte.) et l’utilisation des logiciels de cryptographies libres pour la transmission des informations publiques afin d’être sûr de leur fiabilité ?
Les initiatives de l’Etat :
En tout cas, l’Etat français a déjà pris quelques remarquables initiatives, à savoir :
Article 3
Des technologies ouvertes
Les services de l’Etat, les collectivités locales et établissements publics ne peuvent utiliser à compter du 1er janvier 2002, sous réserve des dispositions de l’article 4, que des logiciels dont l’usage et la modification sont libres et pour lesquels le code source est disponible.
Un décret fixera les conditions de transition avec la situation actuelle.
Article 4
De l’Agence du logiciel libre
Il est créé l’Agence du logiciel libre. Elle est chargée d’informer les services de l’Etat, les collectivités locales et établissements publics des conditions d’application de la présente loi. Elle détermine les licences d’utilisation de logiciels qui rentrent dans le cadre de la présente loi.
Elle veille à l’interopérabilité des logiciels libres au sein des administrations publiques.
Elle réalise l’inventaire, par secteurs d’activité, des manques en matière de logiciels dont l’usage et la modification sont libres et pour lesquels le code source est disponible. En fonction de cet inventaire, elle autorise les administrations publiques à déroger à la présente loi.
L’Agence du logiciel libre est ouverte aux internautes et ses décisions devront en particulier être précédées par des consultations sur lnternet.
• Un correspondant de l’Agence du logiciel libre est désigné au sein de chaque préfecture.
Les modalités de fonctionnement de l’Agence du logiciel libre seront établies par décret.
Article 5
De la diffusion des modifications portées aux logiciels
utilisés dans le cadre de la présente loi
L’Agence du logiciel libre veille, dans le respect des droits des auteurs, à la diffusion des modifications portées aux logiciels utilisés en application de la présente loi.
Ces initiatives pousseraient en effet l’Etat français au rang des Etats européens les plus avancés dans le domaine.
Par contre, la France reste très en retard par rapport à des pays comme le Mexique ou la Chine où le logiciel libre connaît un intérêt très particulier. Le Mexique est en effet en train de passer tout son système scolaire sous Linux.
Conclusion :
Le logiciel libre, au delà de ses aspects idéologiques, est surtout un instrument économique très fort basé sur la collaboration et le travail collectif. En ce sens, il peut, si son dévéloppement est coordonné à l’echelle nationale ou internationale, boulverser l’avenir du marché logiciel. Car s’appuiant sur la réutilisation des travaux existants il se procure une vitesse de dévéloppement beaucoup plus élevée que celle de l’industrie. Le logiciel libre serait-il donc la solution pour l’economie européenne pour contrer la puissance des géants américains tels que Microsoft ?
En tout cas l’Etat devrait sérieusement étudier la question. Car son rôle étant de maximiser l’intérêt national il se doit de procéder d’abord à une sérieuse analyse économique afin de déterminer les actions qu’il devra mener.